L’initiative « Entreprises responsables – pour protéger l’être humain et l’environnement » est très complexe. Depuis quatre ans, elle revient régulièrement dans les débats et comptabilise un nombre incalculable d’allers-retours entre les chambres fédérales. Celles-ci ont largement discuté de la nécessité ou non d’y opposer un contre-projet ainsi que du contenu de ce dernier. Finalement Conseil des Etats et Conseil national sont tombés d’accord sur un contre-projet étant moins contraignant que l’initiative tout en poursuivant le même but.
Commençons par l’initiative. Elle n’est pas soutenue par les milieux économiques pour plusieurs raisons :
- Elle va trop loin notamment en ce qui concerne les règles en matières de responsabilité puisqu’elle demande un report des risques de responsabilité sur une entreprise agissant à l’étranger de tous ses partenaires de la chaîne de production ainsi que ses sous-traitants. Certaines entreprises ont plusieurs centaines de partenaires, rendant le contrôle de toute la chaîne compliquée.
- Elle est difficilement applicable puisqu’elle prévoit un fardeau de la preuve inversée, c’est-à-dire qu’il revient aux entreprises accusées de prouver que ni elles, ni l’un de leurs partenaires, n’ont enfreint les droits de l’homme ou les normes environnementales à l’étranger.
- Elle concerne toute les entreprises suisses. Le législateur devra tenir compte, lors de la mise en œuvre, des PME qui ne présentent des risques en matière de droits de l’homme et de l’environnement que dans une moindre mesure.
- La Suisse ferait cavalier seul, or les questions liées aux droits de l’homme et aux normes environnementales doivent être coordonnées sur le plan international.
En revanche, le contre-projet indirect représente une alternative acceptable à cette initiative.
- Il vise le même but que l’initiative puisqu’il impose l’obligation aux entreprises de rendre compte des mesures prises et de faire preuve de diligence au travers d’un rapport annuel. Les entreprises suisses devront ainsi respecter un devoir de diligence en matière de travail des enfants et de minerais provenant de zones de conflits. Le respect de ces exigences sera contrôlé par une autorité externe et indépendante. Une amende allant jusqu’à 100’000 francs est prévue en cas de non-respect de ces obligations.
- Il impose une transparence accrue sur les enjeux sociaux et environnementaux. Les entreprises suisses auront l’obligation d’établir et publier chaque année un bilan, contenant les objectifs en matière de gaz carbonique, les questions sociales, de personnel, du respect des droits humains et de la lutte contre la corruption. Un manquement à ces obligations serait sanctionné par une amende.
- Les règles qu’il prévoit seraient coordonnées sur le plan international. Elles tiendraient ainsi compte et s’intégreraient dans les différentes règlementations mises en place sur le plan international.
Il pourrait entrer en vigueur si l’initiative est rejetée et, en cas de référendum, s’il est accepté en votation.
Pour toutes ces raisons, la Chambre patronale a décidé à une large majorité de ses membres de refuser cette initiative et de soutenir le contre-projet.